AUTOTROPHIE ET HÉTÉROTROPHIE

AUTOTROPHIE ET HÉTÉROTROPHIE
AUTOTROPHIE ET HÉTÉROTROPHIE

Les besoins d’aliments et d’énergie sont satisfaits de manière différente selon les êtres vivants. Un végétal chlorophyllien fabrique son protoplasme en utilisant des sels minéraux, du gaz carbonique, de l’eau et de la lumière. L’homme et les animaux n’ont pas cette capacité, leur autonomie nutritive n’est pas aussi grande, puisqu’ils exigent des aliments organiques. Leur mode de vie est hétérotrophique, tandis que celui du végétal est autotrophique. Mais l’hétérotrophie est multiple. Un champignon se nourrit de sucres, de nitrates, de sulfates et de quelques autres sels. Un autre, dérivé du premier par mutation, exige en outre un facteur de croissance, une vitamine, qu’il ne peut synthétiser. Il est auxotrophe à l’égard de ce facteur, alors que le premier est prototrophe. Sources d’énergie et exigences alimentaires simples ou complexes se conjuguent dans la diversification des besoins des êtres, sous l’unité apparente des processus biologiques.

1. Les différents types trophiques

Pour les plantes chlorophylliennes, les aliments minéraux sont puisés dans l’air, l’eau et le sol. La lumière leur apporte l’énergie nécessaire. Aussi peut-on imaginer que leur vie est complètement indépendante des autres organismes au point de vue nutritif.

La conception de cette indépendance s’est dégagée depuis la fin du XVIIIe siècle, par les observations de Priestley (1772-1779), Sénebier (1782), Ingen-Housz (1796), de Saussure (1804). Elle s’est imposée après que Pasteur et ses élèves eurent développé, dans la seconde moitié du XIXe siècle, la technique des cultures axéniques, c’est-à-dire des cultures pures, dans lesquelles se développe un seul être, une seule espèce ou une seule souche.

L’autonomie nutritive des végétaux chlorophylliens les fait qualifier d’autotrophes (du grec 精福礼﨏﨎晴益, nourrir, et 見羽精礼﨟, soi-même). Cette autonomie implique qu’ils sont capables de réaliser la synthèse de tous leurs constituants, sans exception.

Par opposition, l’homme et les animaux ont un besoin absolu d’aliments organiques. Ils les trouvent dans le corps des êtres vivants ou morts qu’ils consomment. On les dit hétérotrophes ( 﨎精﨎福礼﨟, autre, différent). Par rapport à leurs propres constituants, leur capacité de synthèse est moindre que celle qui caractérise les autotrophes.

Les hétérotrophes ont un besoin absolu de substances organiques tandis que l’autotrophie est pour les autotrophes une capacité et non une nécessité: on peut cultiver un végétal vert en lui fournissant du glucose comme unique source de carbone. Aussi est-il préférable de parler de modes de vie autotrophiques et hétérotrophiques.

Ces définitions sont d’ailleurs à la fois trop catégoriques et trop imprécises. De nombreuses bactéries, de nombreux champignons peuvent se développer dans un milieu de culture où la seule substance organique offerte est le glucose; les autres aliments nécessaires sont minéraux: nitrate pour l’azote, sulfate pour le soufre, etc. Le glucose, par les oxydations cellulaires, fournit l’énergie requise pour la croissance. Il fournit aussi les chaînes carbohydrogénées des constituants protoplasmiques: autres glucides, protéines, lipides, etc.

Si ce mode de nutrition est l’hétérotrophie pour le carbone, il est autotrophique pour l’azote et le soufre.

Les euglènes, algues unicellulaires des mares, possèdent de la chlorophylle et, par photosynthèse, assimilent le gaz carbonique. Cependant elles ne peuvent vivre sur des milieux purement minéraux. Quelques substances organiques leur sont indispensables: la vitamine B12, les constituants de la vitamine B1 (thiazol et pyrimidine). Si ces algues paraissent douées d’autotrophie pour la majeure partie de leur alimentation, il leur manque donc la possibilité de synthétiser quelques substances nécessaires à la vie, à la croissance et cette lacune les contraint à une vie hétérotrophique.

La plupart des organismes végétaux font eux-mêmes la synthèse de ces substances ou facteurs de croissance. C’est le cas des végétaux chlorophylliens autotrophes et de nombreux champignons et bactéries à qui il suffit de disposer d’un aliment carboné organique relativement simple, glucose ou acide organique. Aussi les classe-t-on avec les autotrophes sous le terme de prototrophes ( 神福諸精礼﨟, le premier).

Au contraire, les organismes qui, comme les euglènes, sont incapables de synthétiser un ou plusieurs métabolites essentiels ou facteurs de croissance sont qualifiés d’auxotrophes (du grec 見羽﨡﨎晴益, croître). Pour caractériser davantage leur mode de nutrition, on peut préciser «auxotrophes à l’égard de telle ou telle vitamine» (cf. tableau).

2. Les modes de vie autotrophiques

Le carbone minéral assimilable étant sous la forme de gaz carbonique ou d’ions carbonate ou bicarbonate, l’autotrophie complète suppose la capacité de fixer ces substances et de les réduire, c’est-à-dire de passer du composé C2 à des constituants dans lesquels les atomes de carbone, d’hydrogène et d’oxygène sont en moyenne dans les rapports qui correspondent à la formule C2H3O. Pour assurer cette réduction, les organismes doivent disposer d’énergie et d’un donneur d’électrons. Les électrons, en attirant des protons toujours présents dans les cellules vivantes, puisque celles-ci sont riches en eau, reconstitueront l’hydrogène présent dans les substances réduites.

Photosynthèse

Parmi les autotrophes, les végétaux chlorophylliens disposent de l’énergie lumineuse. Ils sont phototrophes. Leur autotrophie concerne l’organisme pris dans son ensemble, qu’il s’agisse d’une algue verte unicellulaire comme la chlorelle ou d’un arbre comme le chêne. Mais, pour ce dernier, l’autrophie à l’égard du carbone n’est réalisée que par les feuilles.

Les racines isolées peuvent être cultivées in vitro , mais il faut leur fournir du glucose et le plus souvent des facteurs de croissance. Les feuilles isolées elles-mêmes, pour se bouturer, exigent fréquemment de tels facteurs. Les cultures, in vitro , de cellules vertes, isolées de plantes supérieures, demandent un glucide et plusieurs facteurs de croissance. Leur activité photosynthétique n’est pas nulle, mais généralement insuffisante pour leur assurer une autotrophie. Dans l’organisme entier, l’autotrophie est assurée par la coopération des différents organes, des différentes cellules, dont les potentialités se complètent.

On retrouve à propos des végétaux parasites des déficiences comparables à celles des organes isolés. Ainsi le gui doit-il emprunter à son hôte divers facteurs de croissance.

Les autotrophes pour le carbone présentent des besoins variables à l’égard de l’azote. Ainsi les plantes à fleurs, les fougères, les algues vertes et les algues rouges se nourrissent de nitrates et éventuellement de sels d’ammonium, selon le mode autotrophique.

Les bactéries présentent une plus grande variété de types autotrophiques. Certaines sont chlorophylliennes. Ainsi les Cyanobactéries, appelées autrement «algues bleues», réalisent une photosynthèse semblable à celle des végétaux chlorophylliens. D’autres bactéries, vertes (Chlorobium ) ou pourpres (Chromatium ), vivent dans les eaux sulfureuses; elles utilisent le gaz carbonique, les nitrates. Leur croissance dépend de la lumière qu’elles absorbent, mais, à la différence des végétaux, elles ne peuvent vivre en présence d’oxygène. Pour réaliser leur photosynthèse, il leur faut toujours disposer d’une substance minérale réduite, sulfure ou hydrogène, tandis que les végétaux chlorophylliens utilisent l’eau comme réducteur du gaz carbonique. Tous ces organismes phototrophes sont des photolithotrophes .

Chimiosynthèse

D’autres bactéries autotrophes, non colorées, n’utilisent pas la lumière, mais obtiennent l’énergie qui leur est nécessaire en oxydant le plus souvent en aérobiose diverses substances minérales: sulfures ou soufre des eaux sulfureuses, sels d’ammonium et nitrites des sols. Leur source d’énergie est chimique, on les dit chimiolithotrophes. La synthèse de leurs constituants protoplasmiques à l’aide du gaz carbonique et des sels minéraux sera une chimiosynthèse.

3. Les modes de vie hétérotrophiques

L’homme et les animaux présentent une hétérotrophie complexe. Non seulement l’énergie qu’ils utilisent leur est fournie par l’oxydation de substances organiques d’origine alimentaire, mais il leur faut trouver dans leurs aliments un grand nombre de substances dont ils ne peuvent faire la synthèse: une dizaine d’acides aminés pour les Vertébrés et de nombreuses vitamines. Mais on connaît des êtres hétérotrophes beaucoup moins exigeants, ce sont les prototrophes.

Les prototrophes

De nombreux champignons et des bactéries sont prototrophes pour le carbone. Il en est d’aérobies, d’autres sont anaérobies. Ces derniers peuvent être anaérobies facultatifs (levure de bière) ou anaérobies stricts (certaines bactéries). À l’égard de l’azote, ces organismes se comportent comme des autotrophes. Beaucoup utilisent directement les nitrates comme source d’azote. Il en est cependant qui ne croissent qu’en présence de sels d’ammonium fournissant l’azote déjà réduit. Une remarque parallèle peut être faite à propos du soufre apporté, le plus souvent, sous la forme de sulfates que tous les organismes ne peuvent réduire.

Il existe donc, pour les prototrophes, différentes aptitudes à l’utilisation des petites molécules organiques et minérales.

Les auxotrophes

Un degré plus complexe d’hétérotrophie est atteint avec de nombreux auxotrophes, de sorte que les exigences de beaucoup de bactéries parasites se rapprochent de celles de l’homme. La communauté des besoins est liée à la commune incapacité d’élaborer toute une série d’acides aminés, de vitamines ou facteurs de croissance. Il est fréquent que les organismes parasites, ou paratrophes , aient à cet égard des exigences bien supérieures à celles de leurs hôtes.

À l’extrême de l’hétérotrophie, les virus tirent des cellules dans lesquelles ils vivent la totalité des moyens trophiques et énergétiques de synthèse. Leur hôte fournit chaînes carbonées et systèmes enzymatiques, réalisant l’apport matériel et énergétique que les virus utilisent à leur multiplication.

La phototrophie et l’auxotrophie se retrouvent conjuguées, comme chez les euglènes déjà citées, chez diverses bactéries chlorophylliennes: Rhodospirillum , Rhodopseudomonas . Elles peuvent assimiler le gaz carbonique par photosynthèse, mais à la double condition de disposer de facteurs de croissance et de substances organiques banales: acide malique, acide acétique. On les dit photo-organotrophes. Les acides organiques jouent, à l’égard de leur photosynthèse, le même rôle que les substances minérales réduites pour la photosynthèse des bactéries photolithotrophes, celui de donneur d’électrons.

4. Les organismes ponts

Les bactéries phototrophes présentent une très grande diversité d’aptitudes. Les Rhodospirillum , bien que photo-organotrophes, peuvent se développer dans l’obscurité, mais alors en présence d’oxygène. Dans ces conditions, elles n’utilisent pas le gaz carbonique et vivent comme la majorité des bactéries, en chimio-organotrophes ; l’énergie chimique qui leur est nécessaire est obtenue par l’oxydation de substances organiques. Diverses souches se contentent des sulfures ou de l’hydrogène comme réducteurs. À la lumière, en l’absence d’oxygène, elles se comportent comme les photolithotrophes, mis à part leur exigence en facteurs de croissance. Il en est qui croissent à l’obscurité, en aérobiose, en oxydant les mêmes substances minérales, adoptant le mode de vie des chimiolithotrophes. Les quatre combinaisons possibles entre l’utilisation des deux types d’énergie et des deux types de substances réductrices ne sont peut-être pas réalisées par une seule souche, mais elles se rencontrent dans le même groupe (cf. figure).

Ces organismes aux multiples potentialités, quoique toujours auxotrophes, font le lien entre les deux types de phototrophie et les deux types de chimiotrophie. C’est pourquoi on les qualifie d’organismes ponts.

5. L’autotrophie est-elle primitive?

L’importance des autotrophes dans l’équilibre nutritif de la biosphère

Les grandes capacités de synthèse des autotrophes, photo- ou chimiotrophes, les ont fait considérer autrefois comme primitifs. Ils auraient pu en effet se développer les premiers parmi les êtres vivants, n’ayant besoin d’aucun aliment organique. Il n’est pas certain cependant que l’autotrophie soit primitive par rapport à la prototrophie. En effet, de nombreux composés du carbone, de l’hydrogène et de l’azote, en particulier des acides aminés, peuvent se former dans l’atmosphère sous l’effet des décharges électriques naturelles ou des radiations ultraviolettes. La synthèse de substances «organiques» avant la lettre, sans intervention d’organismes vivants, est bien établie, et des prototrophes, voire des auxotrophes, moins «perfectionnés» auraient pu en profiter à l’aurore de la biosphère. Cependant, parmi les êtres actuels, les prototrophes sont sûrement plus primitifs que les auxotrophes, qui en dérivent manifestement par perte de fonctions. Chez les micro-organismes, de très nombreux exemples sont connus: beaucoup de mutations se font par disparition des capacités de synthèse et engendrent des êtres plus exigeants que leurs parents en facteurs de croissance. La spécialisation des organismes à un milieu restreint – c’est le cas en particulier des parasites et des saprophytes – s’accompagne également d’une perte de pouvoir de synthèse qui permet de concevoir leur origine évolutive à la suite d’une restriction des capacités nutritives.

Dans la biosphère actuelle, néanmoins, l’importance des autotrophes est capitale, puisqu’ils permettent le retour des substances minérales carbonées dans le cycle biologique et que, sans eux, les hétérotrophes ne connaîtraient certainement pas l’essor qu’ils ont acquis.

Encyclopédie Universelle. 2012.

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